Cette publication met l'accent sur deux passages coraniques qui relatent deux événements successifs de l'histoire de Moïse et des Hébreux de manière opposée (voir les versets ci-joint en images), ce qui peut surprendre, a priori. Cela peut prêter à confusion si l'on veut les ordonner chronologiquement en ne se basant que sur celle qui développe très longuement l'histoire (Sourate 2) au détriment de celle qui en parle furtivement (de toute la sourate 4, l'histoire n'est évoquée que dans le verset 153). Et apparemment, beaucoup de ceux qui ont écrit l'histoire de ce prophète, si ce n'est tous (à confirmer), se sont trompés.
Et poutant, il ne fait pas de doute que, concernant les événements chronologiques de l'histoire de Moïse, la demande des enfants d’Israël de voir Dieu précède l'acte d'adoration du Veau, comme l'indique le verset 153 de la sourate 4, puisqu'entre ces deux événements, on trouve l'adverbe "ensuite/puis" (ثُمَّ).
Ce qui nous amène à une question : quelle logique suit les différentes étapes des rebellions des enfants d'Israël qui sont racontées dans la sourate 2, versets 54 à 55 en particulier, qui est le contraire du Coran 4:153, et 51 à 61 en général ?
J'ai la nette impression que cela concerne la gravité des péchés classés dans l'ordre décroissant, du plus grave au moins grave. En tout cas, ça ne peut être une succession d'événements suivant un ordre chronologique car dans le C.2:55, au lieu de l'adverbe "puis" ثُمَّ, qui marque une succession d'événements dans le temps, il y a à la place "quand/et lorsque" وَإِذْ. Sinon, au niveau des deux passages coraniques (C 2:54-55 et C 4:153), il y aurait une contradiction au niveau des événements chronologiques qui y sont relatés.
Ainsi, la première rébellion citée des enfants d'Israël est l'adoration du Veau (V.51-54) qui est un péché majeur en islam puisque c'est de l'associanisme, le shirk. Puis, moins grave, il y a celui où les enfants d'Israël, s'adressant à Moïse, conditionnent de voir Dieu pour croire en sa mission. En punition, une foudre les tua. Dieu les ressuscita ensuite pour qu'ils se repentent (V. 55-56). Encore moins grave, certains d'entre eux déformèrent les paroles de demandent de pardon qu'ils devaient prononcer en se prosternant. Un châtiment avilissant fut envoyé du ciel à ceux-là pour cette autre rébellion (V. 58-59. Pour le fait que c'est une partie d'entre eux qui se rebellèrent, voir C.7:162). Enfin, le plus bas des péchés, plutôt que de continuer à manger la même nourriture venant directement de Dieu, ils demandèrent des aliments variés issus du travail de la terre. En conséquence, "l'avillissement et la misère s’abattit sur eux " (V. 61).
De plus, mis à part l'adoration du Veau qui nécessite une repentance sincère tant l'acte est grave (apparemment, ils devaient se tuer soi-même, combattre leurs mauvais penchants ou nafs, et non s'entretuer), la sévérité des châtiments pour chaque rébellion semble décroître au fil des rebellions qui y sont narrées.
Que peut-on en conclure ?
Que les événements chronologiques de l'histoire de Moïse et des Hébreux sont moins importantes que les enseignements que l'on peut en tirer dans le cadre de la prédication de Muhammad (ﷺ), étant donné que la sourate 2 est antérieure à la sourate 4.
Que des événements d'une histoire racontés dans le Coran ne sont pas forcément dans l'ordre chronologique. D'où la nécessité de les lire attentivement et de les comparer avec les autres sourates.
Que cette différence subtile d'un mot remplacé par un autre selon la thématique d'un même événement souligne l'importance et la profondeur de chaque mot dans le Coran. En effet, même lorsqu'un même événement est abordé sous différentes thématiques, les variations dans le choix des mots ne sont jamais aléatoires. Ils reflètent au final un objectif spécifique, soulignant l'importance de chaque mot utilisé.
Notes :
1️⃣ cette réflexion sera citée dans le prochain ouvrage de Geneviève Gobillot en cours de relecture.
2️⃣ il semble qu'aucun ouvrage n'ait, à ce jour, mentionné l'apparente opposition des deux ordres d'événements cités dans le Coran. Par exemple, "Le Coran des historiens" ne dit rien à ce sujet.
Dans la chronique de Tabari, mais aussi dans l'authentique des récits des prophètes d'Ibn Kathir, l'adoration du Veau par les enfants d'Israël précède leur demande de voir Dieu. Ces deux illustres savants anciens ont donc suivi l'ordre thématique de la sourate 2 qui énumère les diverses rebellions des enfants d'Israël (au détriment de la sourate 4, verset 153), les prenant aussi pour des événements qui se succèdent dans le temps (liste non exhaustive).
3️⃣ il n'est pas indiqué dans le Coran quel type de châtiment réçurent ceux des enfants d'Israël qui déformèrent les paroles qu'ils devaient prononcer en se prosternant, mais on remarque que le terme "rijzan mina al-sama" ("courroux venant du ciel") a trois occurrences dans le Coran. Deux à propos de ceux des enfants d'Israël qui déformèrent les paroles, et une à propos du peuple de Loth. Or, pour le peuple de Loth, ce fut une pluie de pierre qui les tua (Hud:V 82). Mais ce qui pourrait diminuer la gravité du châtiment par rapport au châtiment qui le précède dans la sourate 2, est le fait que cela ne concerne qu'une partie des enfants d’Israël seulement.
4️⃣ le passage de la Bible diffère assez fortement de celui du Coran 2: 55 où les enfants d'Israël demandent à Moïse de voir Dieu pour croire en sa mission. En effet, l'Exode 20:18-21 indique que, par peur de Dieu devant les tonnerres, éclairs, son de trompette et la montagne fumante, ils demandent de ne pas Lui parler directement mais plutôt de parler à Moïse. Par contre, cette épisode biblique se situe chronologiquement avant l'épisode de l'adoration du Veau (Exode 32), ce qui est conforme au Coran 4: 153.


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